On peut voir sur certaines canettes de jus de fruits : "1/5 des fruits et légumes recommandés par jour". Est-ce qu’un jus de fruit du commerce équivaut à un fruit en termes nutritionnels ?
Réponse : FAUX, les jus de fruits du commerce sont considérés comme des "boissons sucrées". En aucun cas ils ne remplacent un fruit et leur consommation excessive contribue à la prise de poids et à l’obésité.
Une alimentation équilibrée doit comporter « cinq fruits et légumes par jour ». Ce slogan est maintenant connu de tous, et bien souvent on se sent incapable de l’appliquer : comment manger 5 grosses pommes et 5 carottes par jour, cela semble impossible !
En effet, c’est impossible, mais derrière ce slogan pas toujours bien compris se cache un conseil plus raisonnable et réaliste : en fait, il s’agit de 5 portions de fruits et/ou de légumes par jour.
Une portion, c’est en gros ce qui tient dans la main ou qui est de la taille d’un poing (et représente 80 à 100 grammes) : une poignée de haricots verts, deux abricots, cinq cerises, une petite pomme, etc.
Et bien sûr c’est cinq en tout (pas cinq fruits ET cinq légumes), et disons plutôt que l’idéal c’est deux portions de fruits et 3 portions de légumes par jour.
Définition des fruits et légumes selon le PNNS (Plan National B-Nutrition Santé) (source : DGCCRF) Sont pris en compte dans ce repère les fruits et les légumes sous toutes leurs formes (crus, cuits, nature ou préparés, frais, surgelés ou en conserves) mais ne sont pas considérés dans l’atteinte de ce repère les fruits secs, séchés et oléagineux . Les légumes regroupent les végétaux non amylacés ou plantes potagères autres que celles apportant de l’amidon. Ce qui exclue du repère sur les fruits et légumes du PNNS, les aliments céréaliers, les pommes de terre, les légumes secs et les légumineuses qui sont des féculents. Les petits pois sont des légumes.
Parce qu’ils apportent des fibres, des vitamines, des minéraux et que des études ont démontré que leur consommation régulière contribue à maintenir une bonne santé. De faible densité énergétique et de forte densité nutritionnelle, les fruits (et les légumes) apportent une contribution efficace à la satiété. Et puis bien sûr parce que c’est un plaisir de les déguster et que le plaisir est une des fonctions essentielles de l’alimentation. Enfin, la consommation de fruits s’inscrit dans une alimentation équilibrée et doit se faire, de préférence, au cours de repas structurés et sous forme solide. (ANSES Glucides). Les fruits contiennent également du fructose, qui est un sucre dit « simple » (comme le glucose et le saccharose), mais ça n’est pas une qualité très intéressante car d’une façon générale notre alimentation est souvent déjà trop riche en sucres simples.
Tous ces points sont très importants et on va voir qu’un jus de fruit est très différent d’un fruit, quoiqu’en disent les industriels.
En nutrition moderne on ne distingue plus des aliments "bons" et "mauvais", mais plutôt des repères de consommation pour chaque catégorie (c’est "la dose qui fait le poison" dit on en médecine). Le jus de fruits fraîchement pressé par vous-même est préférable à tout autre jus du commerce. Néanmoins, cela reste une boisson sucrée, donc à consommer sans excès. Dans ses dernière recommandations, l’Anses souligne également que la consommation de boissons sucrées, incluant les jus de fruits, doit être inférieure à un verre par jour.
Les jus de fruits ne répondent pas comme un fruit aux objectifs d’une alimentation équilibrée :
Les jus de fruits représentent donc des sucres simples « ajoutés », qui augmentent nos apports caloriques sans être utiles à notre équilibre alimentaire. Et c’est un piège majeur qui peut faire prendre des kilogrammes au fil du temps ! Une canette de jus de fruits apporte environ 150 kcal soit près de 8% des calories quotidiennes pour un adulte et davantage encore chez l’enfant. Or, l’obésité peut se constituer à l’occasion d’un déséquilibre énergétique quotidien qui n’est pas forcément très important mais se cumule au fil des mois, surtout chez une personne génétiquement prédisposée au surpoids et qui a peu d’activité physique.
Les jus de fruits sont donc considérés comme des apports de sucres ajoutés à notre alimentation, au même titre que les autres produits industriels sucrés : confiseries, sodas, glaces, etc. (ANSES Glucides)
Les jus de fruits sont cités dans les recommandations de l’ANSES : « D’après des études menées en France, en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, une consommation excessive de glucides, et en particulier de glucides simples ajoutés, notamment sous forme de boissons (jus de fruits, sodas...) serait responsable du développement du surpoids et de l’obésité́ chez les enfants et les adolescents. » (ANSES Glucides – recommandations).
Pourtant, une recommandation de la DGCCRF de 2008 peut jeter le trouble car, sous prétexte de canaliser les recommandations sur la communication des "opérateurs économiques" sur les repères des consommation alimentaire du Programme National Nutrition Santé (PNNS) ce texte stipule : "Pour les jus de fruits, ainsi que les boissons dont chaque portion est préparée avec au moins 80g de fruits et/ou de légumes, il est recommandé de présenter la communication sur une portion du produit comme de nature à atteindre un seul des « 5 fruits et légumes » recommandés par jour. La communication ne doit pas suggérer que les jus de fruits et/ou de légumes peuvent contribuer à plus d’un des « 5 fruits et/ou légumes » au total." Certes, mais quand on écrit sur un canette "1/5 des fruits & légumes recommandés par jour", c’est une formulation trompeuse, car on peut aussi comprendre : "si je bois 5 canettes, j’ai ma ration !"
Aussi, si vous voyez sur un pack de jus de fruit ou une canette la mention "1/5 des fruits et légumes recommandés par jour" : passez votre chemin, ce sont des allégations - totalement imaginaires - de personnes du marketing qui pensent surfer librement sur les recommandations nutritionnelles. Le problème est qu’il n’y a aucun contrôle réellement efficace de leurs allégations et qu’au pire ils risquent - éventuellement - des amendes dérisoires au bout de quelques années de procédure hypothétique. J’avoue que moi-même je suis tenté d’écrire sur mon site : "estcevrai.fr équivaut à 50 fruits et légumes par jour et vous fait vivre 20 ans de plus".
Un jus de fruit n’est pas équivalent à un fruit, c’est une boisson sucrée, source de calories peu utiles sur le plan nutritionnel. Alors, consommez-en pour votre plaisir si vous aimez (personnellement j’adore), préférez les jus de fruits pressé par vous-même, mais buvez-en en quantités raisonnables et surtout pas en prenant comme prétexte que "c’est bon pour la santé".
Niveau de preuve : ÉLÉVÉ
Sources
Anses, rapport "Actualisation des repères du PNNS : établissement de recommandations d’apport de sucres de 2016" https://www.anses.fr/fr/system/files/NUT2012SA0186Ra.pdf Consulté le 20/05/2018
Anses Agence nationale de sécurité sanitaire Alimentation Environnement Travail. Glucides. http://www.anses.fr/PN8701.htm. Consulté le 10/02/2013.
Anses Agence nationale de sécurité sanitaire Alimentation Environnement Travail. Glucides - effets et recommandations. http://www.anses.fr/PN6B01.htm. Consulté le 10/02/2013.
ANSES. Actualisation des repères du PNNS : révision des repères de consommations alimentaires. Décembre 2016 Édition scientifique. https://www.anses.fr/fr/system/files/NUT2012SA0103Ra-1.pdf
Inpes - Catalogue - - Fiche Conseil 1 - "Au moins 5 fruits et légumes par jour sans effort". http://www.inpes.sante.fr/CFESBases/catalogue/pdf/1115.pdf
Atkinson FS, Foster-Powell K, Brand-Miller JC. International tables of glycemic index and glycemic load values : 2008. Diabetes Care. 2008 Dec ;31(12):2281-3.
Bazzano LA, Li TY, Joshipura KJ, et al. Intake of fruit, vegetables, and fruit juices and risk of diabetes in women. Diabetes care. 2008 ;31(7):1311-7.
Muraki I, Imamura F, Manson JE, et al. Fruit consumption and risk of type 2 diabetes : results from three prospective longitudinal cohort studies. BMJ.2013 ;347:f5001.
Barber J Jr. Consumption of certain fruits linked to lower diabetes risk. Medscape Medical News. Published August 29, 2013. http://www.medscape.com/viewarticle/810244 Accessed August 13, 2014.
DGCCRF. Lignes Directrices Relatives à la Communication sur les repères de Consommation Alimentaire et d’activité Physique du Programme National Nutrition Santé. Available online : http://www.economie.gouv.fr/files/directions_services/dgccrf/consommation/information_consommateurs/nutrition/lignes_directrices_nutition_sante.pdf (accessed on 24 August 2015).
10 janvier 2014, 11:56, par Antonin
Bonjour, si on achète des oranges et qu’on les presse soi-même pour boire tout de suite le jus, est-ce que ça n’est pas exactement la même chose que si on les mange ? Je ne vois pas la différence entre le fait de manger l’orange ou de boire tout le jus avec toute la pulpe. Dans les deux cas, il ne reste que la peau. Donc ce que vous dites n’est pas valable pour le jus de fruit frais qu’on fait soi-même ?
12 janvier 2014, 23:12, par Dr Phil
Bonjour, merci de votre message. Et bien, non, ça n’a rien à voir. C’est une question de bon sens. Je vous invite à faire le test : prenez 2 personnes de corpulence et d’appétit comparables et demandez à l’une de presser 3 oranges et de boire le jus, et à l’autre de manger 3 oranges (c’est à dire de les éplucher, puis de manger tous les quartiers d’orange et ceci 3 fois de suite). Dans le premier cas, il pourra sans problème enchainer sur un petit déjeuner complet. Celui qui aura mangé les 3 oranges (si il y arrive) aura bien moins faim pour la suite. Pourquoi ? Parce que manger est une activité complexe, qui fait appel à tous nos sens et à notre cerveau : on désire un aliment, on le regarde, puis on le choisit, puis on le prépare, puis on le mâche. Toutes ces activités mettent en jeu des mécanismes complexes (et en partie inconscients) intégrant la faim, le désir de manger, la recherche de nourriture, le choix d’un aliment, sa préparation, la mastication, les sensation olfactives et gustatives. Elles procurent du plaisir (moteur essentiel de l’alimentation), puis ce plaisir s’estompe et survient la satiété (sentiment d’être repus ou de ne plus avoir faim pour l’aliment concerné). Si on considère ces éléments, on voit bien qu’une orange pressée n’a rien à voir avec une orange. Dans un cas on boit un liquide en 5 secondes, dans l’autre on voit, on choisit, on épluche, on mâche on déguste, on stimule sa salive et les centres de la satiété, etc. En nutrition, et en médecine d’une façon générale, il faut se méfier du jeu du type "marabout - bout de ficelle - selle de cheval,…". C’est le jeu des industriels de l’alimentation, qui nous affirment que : une orange = une orange pressée = un jus industriel = un jus reconstitué à base de jus concentré*, etc. Et demain : une pilule à l’orange ? Donc, non un jus d’orange n’équivaut pas à une orange ; un enfant de 3 ans voit bien la différence, mais dès qu’il regarde la TV et les publicités, il risque de confondre les deux... Bien sûr, si vous aimez le jus d’orange, buvez-en (avec modération car c’est une boisson sucrée), mais surtout pas en remplacement d’un fruit... Je vous engage donc, si vous vous intéressez à la nutrition, à privilégier les aliments les plus naturels possible, ayant subit le moins possible de transformation. En matière de nutrition, cuisiner c’est faire plaisir, transformer, c’est tromper...
* Véridique : je viens de voir sur un jus d’orange de grande surface à base de jus concentré "contribue aux apports de fruits recommandés chaque jour". Un mensonge scandaleux !
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