Cela fait des années qu’on nous vente les vertus des oméga-3 pour le cœur, jusqu’à en mettre sur nos tartines du petit déjeuner. Est-ce que c’est efficace ?
Réponse : c’est FAUX, malgré tous les faisceaux d’arguments de ces dernières années en faveur des effets cardio-protecteurs de oméga-3, l’enrichissement de notre alimentation en oméga-3 sous la forme de compléments alimentaires (gélule, huile, margarine,…) n’a pas d’efficacité démontrée sur la prévention des maladies cardiovasculaires maladies cardiovasculaires Maladies qui concernent le cœur et les vaisseaux. Exemples : infarctus du myocarde, angine de poitrine, insuffisance cardiaque, hypertension artérielle, artériopathie oblitérante des membres inférieurs, troubles du rythme cardiaque, anévrisme, maladie thrombo-embolique, mort subite (trouble du rythme cardiaque entraînant un arrêt cardio-circulatoire). en population générale. Chez certaines personnes la prise de suppléments d’oméga-3 semble même associée à un risque accru de maladies cardio-vasculaires maladies cardiovasculaires Maladies qui concernent le cœur et les vaisseaux. Exemples : infarctus du myocarde, angine de poitrine, insuffisance cardiaque, hypertension artérielle, artériopathie oblitérante des membres inférieurs, troubles du rythme cardiaque, anévrisme, maladie thrombo-embolique, mort subite (trouble du rythme cardiaque entraînant un arrêt cardio-circulatoire). .
Depuis le constat, dans les années 1970, que les Inuit (Groenland), gros consommateurs de poissons gras, faisaient peu de pathologies cardiaques (Bang HO, 1971), les publications se sont multipliées en faveur des effets bénéfiques de l’huile de poisson pour lutter contre maladies les cardiovasculaires.
Aux observations épidémiologiques se sont ajoutées des études fondamentales montrant des effets cardiovasculaires potentiels de certaines graisses contenues dans le poisson : les acides gras polyinsaturés n-3, ce type d’acide gras étant également appelé « oméga-3 ». Des études chez les populations Groélandaises montrèrent qu’un régime alimentaire riche en oméga-3 à chaine longue (ceux dont la molécule est la plus allongée) était associé à un risque moindre de maladie cardiaque.
Les oméga-3 sont un famille d’acides gras dits « essentiels », car ils sont indispensables à notre croissance et au bon fonctionnement de nos cellules. On les trouvent dans certaines huiles (noix, colza, soja, etc.), dans les poissons gras (thon, saumon, maquereau, hareng, sardine, anchois, etc.), et en plus faible quantité dans les viandes, laitages et œufs.
Le précurseur de cette famille, l’acide alpha-linolénique (ALA), est dit « indispensable » car notre organisme ne peut pas le fabriquer : il doit donc obligatoirement être apporté par notre alimentation (ANSES 2011).
Bien que le mécanisme d’action cardiovasculaire des oméga-3 ne soit pas clairement établi, l’hypothèse est que certains oméga-3 à chaîne longue agiraient en abaissant les taux sanguins de triglycérides, en agissant contre les troubles du rythme cardiaque, en diminuant la tension artérielle et en luttant contre l’agrégation plaquettaire (Saravanan P, et al. Lancet 2010).
L’engouement a été tellement fort ces dernières années que des sociétés savantes ont recommandé leur utilisation (sous forme d’apports alimentaires ou de compléments) chez les patients ayant souffert d’un infarctus du myocarde. (American Heart Association Nutrition Committee 2002, ESC Committee for Practice Guidelines 2008). La Food and Drug Administration (FDA 2012) et certaines instances européennes leur ont emboîté le pas et ont approuvé leur utilisation dans certaines situations pour diminuer le risque cardiovasculaire. (eMC 2012).
De là à en faire une panacée pour le cœur, il n’y avait qu’un pas, que les industriels de l’agro-alimentaire ont franchi en nous promettant que leurs produits enrichis en oméga 3 étaient bons pour le cœur de tout le monde.
Si cette étude fait grand bruit, c’est en raison de son envergure : les auteurs ont procédé à une méta-analyse de toutes les études randomisées contrôlées portant sur les effets des oméga-3 (apportés par un régime alimentaire ou par des compléments), sur la mortalité globale et sur les maladies cardiovasculaires maladies cardiovasculaires Maladies qui concernent le cœur et les vaisseaux. Exemples : infarctus du myocarde, angine de poitrine, insuffisance cardiaque, hypertension artérielle, artériopathie oblitérante des membres inférieurs, troubles du rythme cardiaque, anévrisme, maladie thrombo-embolique, mort subite (trouble du rythme cardiaque entraînant un arrêt cardio-circulatoire). . Au total, 20 études (dont 16 en double-aveugle) portant sur l’administration de doses supérieures à 1 gramme/jour d’oméga-3 chez 68680 adultes ont été retenues pour l’analyse.
Les conclusions des auteurs sont sans appel : la supplémentation en oméga-3 n’est pas statistiquement associée à un risque réduit de mortalité (d’origine cardiaque ou autre) ni à un risque réduit d’événements cardiovasculaires majeurs (infarctus du myocarde ou accident vasculaire cérébral). Ces résultats ne justifient pas leur utilisation dans un but préventif en pratique médicale quotidienne.
Certaines données laissaient à penser que les oméga-3 était bénéfiques pour le rythme cardiaque... re-patatras ! Une étude (Macchia A, 2013) montre que la supplémentation pendant 1 an par 1 gramme quotidien d’oméga-3 n’a pas d’efficacité pour prévenir les récidive de la fibrillation auriculaire paroxystique (un trouble du rythme caractérisé par des crises d’arythmies récidivantes). Le taux de récidive à 1 an n’était pas statistiquement différent entre le groupe de patients recevant un placebo (18, 9% de récidive - 56 des 297 participants) et le groupe recevant les oméga-3 (24,0 % - 69 des 289 participants ; hazard ratio risque relatif Le risque relatif (RR) ou hazard ratio (HR) est une mesure statistique qui compare le risque de survenue d’une maladie (ou autre événement) entre deux groupes différents, par exemples exposés ou non à un facteur de risque ou à un médicament. Un RR inférieur à 1 indique une diminution du risque (0,8 signifie -20%) Un RR supérieur à 1 indique une augmentation du risque (1,3 signifie + 30%) Par exemple l’exposition régulière aux UV solaires est associée à un RR de 0,88 (IC95% = 0,82-0,96) de cancer du côlon, soit une diminution de 12 %. A ne pas confondre avec le risque absolu ou l’odds ratio. : 1,28, IC95% IC95% L’intervalle de confiance à 95% (IC95%) est un intervalle de valeurs qui a 95% de chance de contenir la vraie valeur du paramètre estimé. Pour faire simple, si un résultat d’une étude donne le chiffre 4,5 (estimation ponctuelle) avec un IC95% = 1,3-9,6 on voit qu’en fait la "vraie" valeur se situe dans une fourchette très large puisque le résultat a statistiquement autant de chance d’être 1,3 que 9,6. ! La fourchette de valeurs de l’IC95% est donc ESSENTIELLE pour juger d’un résultat communiqué dans une étude. Par exemple, un risque relatif de 1,2 pourrait signifier un risque accru de 20%, mais si l’IC 95% est 0,9-1,3, alors 0,9 a autant de chance d’être la vraie valeur que 1,3 ! C’est une erreur TRES fréquente des journalistes, mais aussi parfois de certains scientifiques que d’oublier l’IC95% et de se tromper dans l’interprétation d’un résultat. 0,90 - 1,83, p = 0.17).
Les études cliniques se suivent et se ressemblent pour conclure que les oméga-3 ne réduisent pas l’incidence des évènements cardiovasculaires. Cette conclusion est celle de l’étude ORIGIN, publiée en 2012, portant sur plus de 12 000 patients diabétiques ou prédiabétiques (The ORIGIN Trial Investigators. N Engl J Med 2012) : sur un suivi de plus de 6 ans, aucun impact des oméga-3 sur la mortalité cardiovasculaire n’est retrouvé. En 2015 la publication d’un suivi supplémentaire de 2,5 ans de l’étude ORIGIN chez environ 5 000 patients (étude baptisée ORIGINALE) confirme encore une fois que les oméga-3 sont sans effet, que ce soit sur le critère principal (mortalité cardiovasculaire) ou les critères secondaires (infarctus du myocarde, troubles du rythme) (The ORIGIN Trial investigators. Diabetes Care 2015).
En 2020, une nouvelle revue systématique confirme l’absence d’effet ou le très faible effet des suppléments d’Omega-3 En 2020, Abdelhamid et coll. on publié une nouvelle revue systématique des 86 études contrôlées, randomisées réalisée sur le sujet (162 796 patients inclus au total dans ces études). Les auteurs concluent : les études de qualité modérée/élevée suggèrent qu’augmenter les apports en oméga-3 n’a pas ou très peu d’effet sur la mortalité cardiovasculaire (Abdelhamid AS 2020). Plus précisément, pour éviter qu’une personne ne soit victime d’un événement coronarien (par exemple un infarctus du myocarde), il faudrait que 167 personnes augmentent leurs apports en oméga-3 (EPA et DHA), et 334 personnes devraient augmenter leurs apports pour éviter qu’une personne ne meure d’une maladie coronarienne.
En 2024, une vaste étude indique que les suppléments d’huile de poisson pourraient augmenter le risque cardiaque En 2024, Chen G et coll. ont publié les résultats d’une très vaste étude menée auprès de 415.737 participants de l’étude "UK Biobank", âgés de 40 à 69 ans, interrogés entre 2006 et 2010 sur leurs données de santé et de mode de vie (Chen G 2024). Parmi ces données, figurait l’apport alimentaire habituel en poisson gras et non gras et en suppléments d’huile de poisson. La santé des participants a été suivie jusqu’en mars 2021. Entre autres résultats, cette étude révèle que chez les participants exempts de maladie cardiovasculaire maladies cardiovasculaires Maladies qui concernent le cœur et les vaisseaux. Exemples : infarctus du myocarde, angine de poitrine, insuffisance cardiaque, hypertension artérielle, artériopathie oblitérante des membres inférieurs, troubles du rythme cardiaque, anévrisme, maladie thrombo-embolique, mort subite (trouble du rythme cardiaque entraînant un arrêt cardio-circulatoire). connue à l’inclusion, la consommation régulière de suppléments d’huile de poisson est associée à un risque accru de 13 % de trouble du rythme cardiaque (fibrillation auriculaire) et à un risque accru de 5 % d’accident vasculaire cérébral. En revanche, chez les personnes qui souffraient d’une maladie cardio-vasculaire maladies cardiovasculaires Maladies qui concernent le cœur et les vaisseaux. Exemples : infarctus du myocarde, angine de poitrine, insuffisance cardiaque, hypertension artérielle, artériopathie oblitérante des membres inférieurs, troubles du rythme cardiaque, anévrisme, maladie thrombo-embolique, mort subite (trouble du rythme cardiaque entraînant un arrêt cardio-circulatoire). au début de l’étude, la consommation de suppléments d’huile de poisson pourrait être bénéfique en limitant l’aggravation de la maladie.
* En 2010, l’Afssa a revu à la hausse l’apport nutritionnel conseillé (ANC) pour l’acide alpha-linolénique (oméga-3 indispensable) dans un but de prévention de maladies cardiovasculaires maladies cardiovasculaires Maladies qui concernent le cœur et les vaisseaux. Exemples : infarctus du myocarde, angine de poitrine, insuffisance cardiaque, hypertension artérielle, artériopathie oblitérante des membres inférieurs, troubles du rythme cardiaque, anévrisme, maladie thrombo-embolique, mort subite (trouble du rythme cardiaque entraînant un arrêt cardio-circulatoire). (Afssa 2010)
Niveau de certitude : ÉLEVÉ
Sources :
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ANSES. Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation de l’environnement et du travail. Les acides gras oméga 3. Juillet 2011. http://www.anses.fr/PNQ301.htm consulté le 10/02/2013.
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The ORIGIN Trial Investigators. n–3 Fatty Acids and Cardiovascular Outcomes in Patients with Dysglycemia. N Engl J Med 2012 ; 367:309-318July 26, 2012DOI : 10.1056/NEJMoa1203859.
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Abdelhamid AS, Brown TJ, Brainard JS, Biswas P, Thorpe GC, Moore HJ, Deane KHO, Summerbell CD, Worthington HV, Song F, Hooper L. Omega-3 fatty acids for the primary and secondary prevention of cardiovascular disease. Cochrane Database of Systematic Reviews 2020, Issue 3. Art. No. : CD003177. DOI : 10.1002/14651858.CD003177.pub5
Chen G, Qian Z(, Zhang J, et al Regular use of fish oil supplements and course of cardiovascular diseases : prospective cohort study BMJ Medicine 2024 ;3:e000451. doi : 10.1136/bmjmed-2022-000451
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